mardi 9 avril 2013

Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants


 
Auteur : Mathias ENARD
 
Editeur : Actes Sud
Collection : Romans, Nouvelles
Roman historique - Architecture - Peinture -
Michel-Ange - Constantinople - Goncourt des Lycéens
Pages : 153
Parution : Août 2010

 
 
 
 
 
 
 
 
Synopsis :

13 mai 1506, un certain Michelangelo Buonarotti débarque à Constantinople. A Rome, il a laissé en plan le tombeau qu'il dessine pour Jules II, le pape guerrier et mauvais payeur. Il répond à l'invitation du Sultan qui veut lui confier la conception d'un pont sur la Corne d'Or, projet retiré à Leonardo da Vinci. Urgence de la commande, tourbillon des rencontres, séductions et dangers de l'étrangeté byzantine, Michel Ange, l'homme de la Renaissance, esquisse avec l'Orient un sublime rendez-vous manqué.

 
En 1506

Débarque à Constantinople le très célèbre Michel-Ange, jeune et débutant une belle carrière. Il vient de quitter l’Italie et laisse derrière lui le chantier à Rome pour lequel il était en train d’œuvrer, l’édifice du tombeau de Jules II, pape guerrier, orgueilleux et mauvais payeur.

Michel-Ange n’a pu refuser l’invitation du Sultan Bayazed qui propose au sculpteur une somme gigantesque afin d’utiliser son génie pour qu’il lui dessine et lui conçoive un pont reliant les deux rives du Bosphore. Un pont sur la Corne d’Or dont même les plans de Léonard de Vinci ont été refusés pour la conception de ce pont.
Le fait que Léonard de Vinci est échoué dans cette épreuve pousse Michel-Ange a relevé ce défi. Il espère également par cet accueil à Constantinople, fuir l’Italie et les désagréments quotidiens, notamment d’argent. Une forte somme est proposée à Michel-Ange pour la conception de ce pont.

En cette ville qu'est Constantinople, il découvre des lieux étonnants, fait la rencontre d’un poète, Mesihi, qui devient rapidement un ami.
L'inspiration manquant à Michel-Ange, l’ami et poète Mesihi va lui faire découvrir toutes les splendeurs de la ville et ce que celle-ci recèle en beauté diverse selon les différents quartiers de la ville. Michel-Ange va s’imprégner des différentes cultures présentes dans cette ville car ici la civilisation vient de tout horizon. Il va découvrir l’art oriental. Et bientôt Mesihi va l’emmener dans un lieu où Michel-Ange tombera en fascination pour une danseuse andalouse.


De là, Michel-Ange va retrouver l’inspiration qui lui manquait.

Mais l’artiste sera vite la proie du désir et de complots…

Un court roman qui se lit très rapidement.
 
Sous la plume délicate de Mathias Enard on découvre une période de la vie de Michel-Ange plutôt méconnue, quelques semaines de la vie de l’artiste totalement oubliées des faits historiques.
Mathias Enard en vient donc à « supposer » que les quelques semaines passées à Constantinople ont très certainement marquées l’artiste en différents points tels que les parfums, les lumières sur les corps, les musiques, les couleurs et beautés du monde ottoman, et que tout ceci lui a apporté beaucoup et l’a fortement inspiré pour la création de la Chapelle Sixtine. Il s’est bien sûr appuyé sur des textes et en a tiré de judicieuses suppositions pour faire corroborer ces quelques semaines manquantes à l’Histoire sur la vie de Michel-Ange et démontrer par-là que la fresque de la Chapelle Sixtine serait largement influencée de ce voyage à Constantinople et que tout ce qu’il y a découvert aurait nourri son inspiration. Les regards, les lumières des corps, les objets, etc, que l'on peut voir sur la fresque de la Chapelle Sixtine seraient largement inspirés de ce voyage.
Les faits réels et ceux imaginés sont parfaitement liés, parce que l’auteur a su retranscrire le tout en suggérant ou simplement évoquant les mystères de cette période oubliée à Constantinople. 
Une plume incroyable !! Finesse, beauté, et l’auteur sait exalter nos sens. Descriptions à foisons, dépaysement total. Il fait appel au voyage à travers ce court roman décliné lui aussi en courts chapitres. Le style subtil de l’auteur nous fait donc voyager à travers les couleurs chatoyantes, les parfums très nombreux et divers, les lumières orientales, les sons et musiques. Mais aussi un voyage grâce aux différents personnages rencontrés, aux lieux largement décrits et divers. On passe des étals de marchandises aux nuits dans les estaminets aux murs de céramiques multicolores où les pièces sont parsemées de lampes à huile qui enfument l’atmosphère et où les coussins juchent le sol. Une invitation au voyage…. Plateau de cuivre, timbales, coupes de vin et d’eau parfumée, breuvages doux aux parfums d’herbes, et rythmes orientaux des musiciens….
L’auteur nous fait apparaître un Michel-Ange émerveillé devant la beauté de la ville et des êtres, mais aussi un artiste colérique avec beaucoup de mouvements d’humeurs, il est rempli de doutes.
J’ai apprécié également en fin de livre, les diverses explications de l’auteur quant aux faits réellement retracés et les éléments dont il s’est appuyé, et il explique ce qu’il en a déduit et suggérer pour le reste dont on ne sait rien…
Pour conclure, un petit mot juste pour dire que j’aime beaucoup la pagination chez Actes Sud, le format du livre, le toucher du papier…
 
Une très belle découverte, un texte magnifique, une invitation au voyage qui donne ensuite l’envie d’observer la fresque de la Chapelle Sixtine….
En peinture comme en architecture, l’œuvre de
Michelangelo Buonarroti devra beaucoup à Istanbul.
 
 
Livre lu et chroniqué sur mon ancien blog en Avril 2013